Étude des transferts horizontaux d’éléments transposables dans les génomes de Drosophilidae : influence de la proximité géographique/écologique
Contact : Aurélie Hua-Van (Equipe Evolution et Génome) aurelie.hua-van@universite-paris-saclay.fr
Lieu : Laboratoire Evolution, Génomes, Comportement, Ecologie – Université-Paris-Saclay- CNRS – Gif-sur-Yvette.
Mots-Clés : Eléments transposables, Genomique, Evolution, Transfert Horizontaux, Drosophiles
Étude des transferts horizontaux d’éléments transposables dans les génomes de Drosophilidae : influence de la proximité géographique/écologique
CONTEXTE SCIENTIFIQUE :
Les éléments transposables (ET) sont des éléments génétiques mobiles capables de se déplacer et de se répliquer au sein des génomes hôtes. En raison de leur nature égoïste et invasive, les ET sont fréquemment considérés comme des parasites génomiques (Hua-Van et al., 2011). Tous les génomes eucaryotes contiennent des ET, qui peuvent représenter plus de 80 % de leur contenu en ADN. Au sein d’une même espèce, plusieurs centaines à plusieurs milliers de familles distinctes d’ET peuvent coexister. Ces familles peuvent différer considérablement en nombre de copies, en âge, en distribution génomique et en activité de transposition.
Chez les eucaryotes, les ET sont particulièrement enclins au transfert horizontal entre des espèces reproductivement isolées, contrairement aux transferts de gènes qui sont peu fréquents. Des études récentes comparant les séquences d’ET entre des espèces phylogénétiquement éloignées ont révélé l’étendue des transferts horizontaux d’ET (HTT) (Peccoud et al. 2016). Le processus mécanistique derrière les HTT reste largement mal compris, mais les bactéries ou les virus pourraient constituer des vecteurs probables. Les opportunités de transfert dépendent principalement des interactions entre les espèces ou entre les espèces et leurs symbiotes/parasites partagés, suggérant l’implication de facteurs écologiques/géographiques. Le succès d’un nouvel ET à s’amplifier et s’établir dans le génome d’une nouvelle espèce hôte dépend également de divers paramètres, notamment démographiques, populationnels et phylogénétiques, ainsi que d’une dose de contingence, telle que la rapidité à établir les régulations piARN.
Bien que certaines insertions d’ETs puissent être cooptées par l’hôte et contribuer à l’innovation évolutive, la majorité des insertions sont neutres ou délétères. Pour limiter leur impact, les organismes hôtes ont développé des mécanismes de régulation, comme la voie piRNA chez les métazoaires, qui suppriment l’activité des ETs et limitent la transposition (Brennecke et al., 2007). De plus, comme les ETs ne codent aucune fonction essentielle pour la cellule hôte, les insertions individuelles peuvent accumuler des mutations qui ne sont pas éliminées par la sélection naturelle. Avec le temps, les mécanismes de contrôle, combinés à l’accumulation de mutations, conduisent à l’inactivation et à l’extinction des familles d’ET.
Malgré ces contraintes, des familles actives d’ET persistent dans tous les génomes eucaryotes, en partie grâce aux transferts horizontaux d’ET (HTT) entre espèces, qui semblent récurrents. Contrairement aux gènes classiques, les ETs peuvent se déplacer entre espèces/lignées isolées d’un point de vue reproductif, et des études de génomique comparative ont révélé de nombreux événements de transfert horizontal, y compris entre des taxons phylogénétiquement très éloignés (Peccoud et al., 2016). Bien que les mécanismes des HTT restent mal compris, des vecteurs tels que les virus, les bactéries ou les interactions parasitiques sont suspectés. Les proximités écologique et géographique sont également considérées comme des facteur sfacilitant les événements de transfert horizontal, via des environnements, hôtes ou symbiotes partagés.
OBJECTIFS DU STAGE :
L’objectif de ce stage est d’évaluer dans quelle mesure la proximité géographique, écologique et phylogénétique influence le taux et le succès des transferts horizontaux d’éléments transposables. En utilisant une approche de génomique comparative et de bioinformatique, le/la stagiaire analysera un ensemble de données exceptionnellement riche comprenant les assemblages de génomes de plus de 300 espèces de Drosophilidae (Suvorov et al., 2022). La famille des Drosophilidae, qui s’est diversifiée il y a environ 50 à 60 millions d’années, comprend plus de 4 000 espèces décrites et présente une diversité écologique et morphologique remarquable. Cet ensemble de données constitue une ressource unique en termes d’amplitude phylogénétique et de variation écologique et fournit un cadre idéal pour étudier la dynamique des ETs à l’échelle évolutive. Ce projet vise à répondre à des questions clés telles que :
- Les traits écologiques influencent-ils la probabilité de transmission des ETs entre espèces ?
- Les transferts horizontaux sont-ils plus fréquents entre des espèces qui coexistent géographiquement ?
MÉTHODOLOGIES :
Le/la stagiaire adaptera une pipeline combinant annotation des ETs, génomique comparative et modélisation statistique afin d’étudier les motifs de transfert horizontal (HT) à travers la phylogénie des Drosophilidae. Les principales étapes incluent :
- Annotation des ETs
Les ETs seront identifiés à l’aide d’outils de détection de novo et par homologie (par exemple, RepeatModeler, RepeatMasker), avec des bibliothèques personnalisées construites si nécessaire pour une meilleure précision. - Classification des familles
Les séquences d’ETs seront regroupées en familles selon leur similarité de séquence, à l’aide d’outils comme MAFFT ou VSEARCH. - Détection de transferts horizontaux
Les événements de transfert horizontal seront inférés en comparant la divergence des ETs avec celle des espèces hôtes, en utilisant des méthodes adaptées de Wallau et al. (2016) et approches similaires. - Analyses de corrélation
Le/la stagiaire testera les associations entre la fréquence des HTs et des facteurs tels que la distance phylogénétique, le chevauchement géographique et la similarité écologique, à l’aide de modèles linéaires généralisés et de modèles de phylogénie. - Tests de robustesse
Des tests de permutation permettront d’évaluer la robustesse des associations détectées en comparant les résultats observés à des résultats réorganisés aléatoirement.
PROFIL RECHERCHÉ
Nous recherchons un(e) étudiant(e) motivé(e) ayant :
• Une formation en biologie évolutive, génomique ou bioinformatique.
• Une maîtrise de base d’un langage de script (Python, R ou Bash).
• Une familiarité avec les outils d’alignement de séquences et de phylogénie est un plus.
• Un intérêt pour l’évolution des génomes, les éléments mobiles et les interactions entre espèces.
RÉFÉRENCES
- Brennecke, J., Aravin, A.A., Stark, A., Dus, M., Kellis, M., Sachidanandam, R., Hannon, G.J., 2007. Discrete Small RNA-Generating Loci as Master Regulators of Transposon Activity in Drosophila. Cell 128, 1089–1103. https://doi.org/10.1016/j.cell.2007.01.043
- Hua-Van, A., Le Rouzic, A., Boutin, T.S., Filée, J., Capy, P., 2011. The struggle for life of the genome’s selfish architects. Biol Direct 6, 19. https://doi.org/10.1186/1745-6150-6-19
- Peccoud, J., Loiseau, V., Cordaux, R., Gilbert, C., 2017. Massive horizontal transfer of transposable elements in insects. Proc Natl Acad Sci U S A 114, 4721–4726. https://doi.org/10.1073/pnas.1621178114
- Wallau, G.L., Capy, P., Loreto, E., Le Rouzic, A., Hua-Van, A., 2016. VHICA, a New Method to Discriminate between Vertical and Horizontal Transposon Transfer: Application to the Mariner Family within Drosophila. Mol Biol Evol 33, 1094–109. https://doi.org/10.1093/molbev/msv341
- Kim, B.Y., Gellert, H.R., Church, S.H., Suvorov, A., Anderson, S.S., Barmina, O., Beskid, S.G., Comeault, A.A., Crown, K.N., Diamond, S.E., Dorus, S., Fujichika, T., Hemker, J.A., Hrcek, J., Kankare, M., Katoh, T., Magnacca, K.N., Martin, R.A., Matsunaga, T., Medeiros, M.J., Miller, D.E., Pitnick, S., Simoni, S., Steenwinkel, T.E., Schiffer, M., Syed, Z.A., Takahashi, A., Wei, K.H.-C., Yokoyama, T., Eisen, M.B., Kopp, A., Matute, D., Obbard, D.J., O’Grady, P.M., Price, D.K., Toda, M.J., Werner, T., Petrov, D.A., 2023. Single-fly assemblies fill major phylogenomic gaps across the Drosophilidae Tree of Life. bioRxiv 2023.10.02.560517. https://doi.org/10.1101/2023.10.02.560517
PROFIL RECHERCHÉ
Nous recherchons un(e) étudiant(e) motivé(e) ayant :
• Une formation en biologie évolutive, génomique ou bioinformatique.
• Une maîtrise de base d’un langage de script (Python, R ou Bash).
• Une familiarité avec les outils d’alignement de séquences et de phylogénie est un plus.
• Un intérêt pour l’évolution des génomes, les éléments mobiles et les interactions entre espèces.